Texte paru comme supplément à Combattre pour le socialisme n°55 en février 1995

 

 

 


Complète dégénérescence

 

 

les responsables

condition de l'«indépendance» syndicale, selon trotsky

le «zrs» participe au gouvernement meciar

«ne pas laisser le pays aller à vau-l'eau»

contre toute pression impérialiste sur la slovaquie

des partis ultra-nationalistes

il n'y a pas de voie slovaque

louisa hanoune et le «pt d'algérie» dans leurs œuvres

alexandre hebert dans ses œuvres

 

les responsables


Lambert et Gluckstein poursuivent la "construction" de leur "Internationale", la dite "Entente Internationale des Travailleurs", dont l'«Alliance Européenne des travailleurs» fait partie. «Informations Ouvrières» n°158 datée de la semaine du 7 au 13 décembre a annoncé que «le secrétariat provisoire de l'AET réuni le 4 décembre, a adopté une lettre d'invitation à la conférence ouvrière mondiale». Dans ce même numéro d'«IO», sous le pavé «11-12 Mars 1995 - Conférence ouvrière mondiale», on lit: «Une conférence ouvrière mondiale est convoquée [par qui?] face au piège que les organisateurs du "sommet social" de l'ONU essaient de tendre aux organisations ouvrières.»


«Dans le respect de l'indépendance de tous» la conférence mondiale vise «à rassembler ceux pour lesquels, le fait accompli ne peut pas être assimilé à des négociations véritables et pour lesquels la préservation des organisations ouvrières indépendantes est un élément fondamental de toute société démocratique.»


Qu'en termes équivoques ces choses-là sont dites. Ce petit joyau de texte est digne des motions de synthèse du bon temps de la SFIO, ou encore des congrès de FO. Il est interprétable de multiples façons. Qu'est-ce qu'une «Conférence ouvrière» fût‑elle mondiale? La représentation de travailleurs se rassemblant et s'organisant eux-mêmes sur les lieux de leur travail ou (et) de leur habitation? La représentation des organisations d'origine ouvrière (syndicats et partis)? La représentation des seules organisations syndicales, confédérations, fédérations, syndicats? La représentation d'organisations plus ou moins officiellement membres de l'«Entente Internationale des Travailleurs»? En fait les termes «Conférence ouvrière mondiale» permettent de jouer dans tous les sens et servent de couverture aux dites "EIT" et "AET" qui tirent les ficelles et auxquelles cette soi-disant conférence doit servir de marchepied.


Mais quelles sont donc ces «organisations ouvrières» si naïves qu'elles risquent de tomber dans le «piège que les organisateurs du "sommet social" de l'ONU essaient de leur tendre»? On croit comprendre que ce sont les centrales, les fédérations syndicales, les syndicats, ou plutôt leurs appareils, lesquels participent à tous les organismes internationaux (ONU, BIT, Union Européenne) et nationaux (en France: Conseil économique et social, Conseils économiques et sociaux régionaux, multiples structures de participation dans les différents secteurs économiques, dans les entreprises, les localités, de cogestion avec le patronat, etc...). Les bourgeoisies, les États nationaux bourgeois, les superstructures impérialistes internationales n'ont pas les moyens de contraindre ces appareils à y participer: ils le font volontairement sans quoi ces organismes ne pourraient exister. Ils permettent ainsi au capital de poursuivre toujours plus loin ses attaques contre les prolétariats, les populations laborieuses. Ce sont eux qui sont les instruments de la subordination des confédérations, des fédérations, des syndicats aux États nationaux bourgeois, aux organismes internationaux impérialistes, au régime capitaliste en crise. C'est en se fondant sur leur politique que l'ONU organise le "sommet social".


Les appareils bureaucratiques défendent avec acharnement la société bourgeoise, le régime capitaliste en crise. Ce sont les organisateurs des défaites ouvrières. Tout au plus craignent-ils «le fait accompli» et veulent-ils des «négociations véritables» genre Air‑France. Ils caractérisent cette pratique d'«élément fondamental de toute société», société qu'ils considèrent alors comme «démocratique».


condition de l'«indépendance» syndicale, selon trotsky


Donc l'«AET» "invite" à cette «Conférence ouvrière mondiale». Prenons acte. Mais sur quel axe? Sur celui de «l'indépendance des organisations ouvrières», organisations qui sont, croit-on comprendre, les confédérations, fédérations syndicales, les syndicats. Mais "indépendance" par rapport à qui, par rapport à quoi? Par rapport au capital, par rapport aux États bourgeois, à leurs organismes nationaux et internationaux?

Alors "l'indépendance" signifierait: rupture avec la bourgeoisie, le capital, les États bourgeois, leurs organismes nationaux, les organismes impérialistes internationaux ; lutte contre eux et pour en finir avec eux. Devrait être à l'ordre du jour de la dite "Conférence ouvrière mondiale": le combat politique pour que les "organisations ouvrières" (en l'occurrence les confédérations, les fédérations syndicales, les syndicats) rompent avec la politiques et les organismes de "participation" ; le combat politique contre leurs appareils bureaucratiques qui les y enchaînent, pour qu'elles pratiquent une politique d'attaque et de mise en cause du capitalisme en crise, ses superstructures nationales et internationales.


Par contre les "organisations ouvrières" doivent être dépendantes du prolétariat, de la population laborieuse, de leurs intérêts. La défense des "organisations ouvrières" et notamment syndicales passent par la revendication adressée à leurs directions: «rompez avec la bourgeoisie, les États bourgeois, les organismes de participation, de co‑gestion, etc...» et par le combat pour cette rupture. Or il n'est pas question que cette dite "conférence ouvrière mondiale" ait cet ordre du jour et se fixe ces objectifs.


On est loin, très loin, à l'opposé, de ce que Trotsky écrivait dans «Les syndicats à l'époque de la décadence impérialiste»:


«L'intensification des contradictions de classe dans chaque pays et des antagonismes entre les nations produit une situation dans laquelle le capitalisme impérialiste ne peut tolérer (c'est-à-dire à un certain moment);une bureaucratie réformiste, que si cette dernière agit directement comme actionnaire, petite, mais active dans les entreprises impérialistes, dans leurs plans et leurs programmes, au sein même du pays aussi bien que sur l'arène mondiale, le social-réformisme doit être transformé en social-impérialisme dans le but de prolonger son existence et rien de plus, car en suivant cette voie il n'y a en général aucune issue.


«Ceci signifie-t-il qu'à l'époque impérialiste les syndicats indépendants sont en général impossibles? Ce serait fondamentalement erroné de poser la question de cette façon.


«Impossibles sont les syndicats réformistes indépendants ou semi‑indépendants. Tout à fait possibles sont les syndicats révolutionnaires qui non seulement ne sont pas des soutiens de la police impérialiste mais qui se fixent comme tâche de renverser directement le système capitaliste. A l'époque du capitalisme décadent, les syndicats ne peuvent être réellement indépendants que dans la mesure où ils sont consciemment dans l'action des organes de la révolution prolétarienne. Dans ce sens, le programme transitoire adopté par le dernier congrès de la IVème Internationale est non seulement le programme d'activité du parti, mais dans ses lignes essentielles, également le programme de l'activité syndicale.»


le «zrs» participe au gouvernement meciar


La «conférence ouvrière mondiale» devrait se tenir les 11-12 mars 1995 à Banska Bystrica, Slovaquie. C'est «Jan LUPTAK, président de l'Association des Ouvriers de Slovaquie (ZRS) [qui] a présenté aux délégués du IVème congrès (du PT français) les décisions prises lors de la réunion du secrétariat provisoire de l'Alliance Européenne des Travailleurs» ("IO" n°158). Jan LUPTAK est devenu un des personnages les plus importants de l'«EIT» et de l'«AET». Pourquoi? Il l'a expliqué lui-même devant le IVème congrès du "PT" français:


«Notre Association des Ouvriers de Slovaquie (ZRS) s'est transformée, en juin dernier en véritable parti. Elle a ensuite gagné lors des élections législatives 13 députés au Parlement, qui en compte 150. Un député de notre parti a été élu à la vice-présidence au Parlement et deux autres ont été élus à la présidence de deux commissions parlementaires. Des membres de notre parti ont aussi été désignés à la tête de très importants organismes officiels de contrôle.» Mais il a négligé d'informer que quatre membres du ZRS allaient devenir ministres du gouvernement qu'était alors en train de former Vladimir MECIAR.


Pourtant depuis plusieurs semaines la question de la participation du ZRS à un gouvernement que dirigerait Vladimir MECIAR, leader du HZDS, et auquel participerait également le SNS, était débattue. "IO" n°152 (26 octobre au 1er novembre) expliquait:


«Sur la scène politique slovaque qui est particulière, il y a pour nous une autre préoccupation. Elle porte sur une des questions les plus fondamentales du mouvement ouvrier depuis plus d'un siècle: le parti des ouvriers peut-il participer au gouvernement et, si oui, dans quelles conditions? Vieux problème qui se pose à nouveau aujourd'hui, alors qu'un parti de l'AET est devenu un participant possible au gouvernement et même un participant convoité.»


A quoi Jan LUPTAK répondait par avance (citation faite dans le même article):


«"Quant au parti des ouvriers il ne peut ni ne veut devenir un parti des puissants, un membre de la future coalition gouvernementale". Mais répète LUPTAK "la ZRS appuiera tout gouvernement (sans s'intéresser à sa couleur politique [Ah!] ‑ qui sera prêt à réaliser les revendications des ouvriers, les exigences formulées dans le programme électoral du parti des travailleurs".»


Comment un gouvernement peut-il satisfaire les revendications ouvrières indépendamment «de sa couleur politique» ?


Sur cette orientation l'article de Jan TESAR concluait:


«Mais constatons que la direction nationale de la ZRS vient à nouveau de rejeter toute participation au gouvernement, se déclarant prête à conclure des accords, même formels et écrits, avec n'importe quel parti politique, qui se prononcera pour la plate-forme de la ZRS.»


Mais le 13 décembre 1994 un gouvernement MECIAR est officiellement annoncé. Contrairement aux affirmations de Jan LUPTAK et de Jan TESAR le ZRS y participe. "Le Monde" du 15 a publié la liste de ses principaux ministres:

«Premier ministre: Vladimir MECIAR (HZDS) ; vice‑premier ministre et ministre des finances: Katarina TOTHOVA (HZDS) ; vice‑premier ministre: Jozef KALMAN (ZRS) ; ministre des affaires étrangères: Juraj SCHENK (HZDS) ; ministre de la défense: Jan SITEK (SNS) ; ministre de la justice: Jozef LISCAK (ZRS) ; ministre des privatisations: Peter BISAK (ZRS) ; ministre de l'économie: Jan DUCKY (HZDS) ; ministre de l'éducation et de la science: Eva SLAVKOVSKA (SNS).»


«ne pas laisser le pays aller à vau-l'eau»


S'ils ne lisent pas d'autre presse, les lecteurs d'«IO» auront dû attendre un mois pour l'apprendre. Encore est-ce à l'occasion d'un «reportage en Slovaquie» paru dans "IO" n°163 (semaine du 18 au 24 janvier 1995) qu'ils l'auront appris et sous la forme suivante:


«Jan LUPTAK déclarait lors de la conférence de la ZRS à Banska Bystrica: "Cela a été une décision difficile d'entrer dans la coalition gouvernementale. Nous avons d'abord refusé... Mais il s'avérait impossible de laisser aller le pays à vau-l'eau" et rappelait les conditions posées par le ZRS: "le gel des privatisations", "la poursuite des prévaricateurs‑privatiseurs", "le maintien de tous les budgets sociaux" et "le refus de la politique d'endettement auprès du FMI".»

Pourquoi le ZRS avait-il d'abord refusé d'entrer dans le gouvernement de Vladimir MECIAR? On ne le sait pas et on ne le saura pas, Jan LUPTAK n'en dit rien. Il dit par contre pourquoi il y est entré: «Impossible de laisser le pays aller à vau-l'eau» et encore qu'il s'agit du «moindre mal». En bref il s'agit de la classique "real‑politique", la politique du "réalisme" qui a toujours été catastrophique pour le prolétariat, la population laborieuse, la jeunesse, qui ne peut que l'être et est extensible à l'infini.


Mais que pensent "IO", le "PT", le "CCI" du gouvernement MECIAR, de sa nature, de sa politique, de la participation du ZRS à ce gouvernement? Ils se taisent. Sans doute au nom du «respect de l'indépendance de tous».


contre toute pression impérialiste sur la slovaquie


Le gouvernement MECIAR est violemment attaqué par la presse bourgeoise. Ainsi "Libération” du 19 décembre 1994 écrivait:


«Dès le lendemain des élections, il
[MECIAR] s'attaqua à la personne du président de la République réclamant la démission de Michel KOVAC et préconisant un régime présidentiel fort taillé sur mesure. Il y eut surtout ce qu'à Bratislava on appelle "la nuit des longs couteaux" du 3 au 4 décembre, où le Parlement siégea vingt-trois heures sans interruption et où MECIAR et ses nouveaux partenaires s'assurèrent le contrôle total des postes‑clefs dans l'appareil de la sécurité, des médias (télévision et radio) et en particulier du Fonds de privatisations qui restent l'enjeu majeur de la réforme économique.


«Dans la foulée, le parlement annulait ‑ fait sans précédent ‑ à titre rétroactif des contrats de privatisation déjà adoptés. En s'attaquant aux institutions (Présidence, Cour constitutionnelle, invalidation de mandats parlementaires) et aux principes de l'Etat de droit (rétroactivité) tout en refusant, pendant deux mois et demi de former un gouvernement, Vladimir MECIAR menait une stratégie de déstabilisation, censée favoriser dans l'opinion l'acceptation d'un pouvoir présidentiel fort (le sien de préférence).»


"IO" ne dit rien, se tait. Serait-ce que «la violation» de ce que "Libération" appelle les «principes élémentaires de l'Etat de droit» est, pour "IO", le "PT", le "CCI" et leurs amis "démocrates", "choquant" et contraire à la "démocratie"? Est-ce au contraire conforme à leur conception de la "démocratie"?


Il faut le dire nettement, si la presse bourgeoise attaque violemment MECIAR et son gouvernement la "démocratie" n'a rien à y voir. Remettre, plus ou moins, en cause en Slovaquie la politique de privatisation c'est gêner la politique de rétablissement du capitalisme en Europe centrale et orientale, de subordination des pays de cette région aux puissances impérialistes, politique qu'appliquent leurs organismes internationaux (l'ONU, le FMI, la Banque Mondiale, la Commission européenne, la Banque européenne) et leurs gouvernements.


Se prononcer clairement, indépendamment de la nature, de l'orientation que suivent MECIAR et son gouvernement, contre l'intervention quelles qu'en soient les formes, des puissances impérialistes en Slovaquie, défendre le droit du peuple slovaque à disposer de lui-même est indispensable. C'est l'ABC de toute politique révolutionnaire. Cette position n'est pas originale. Elle procède des principes du soutien inconditionnel des pays aux prises avec les puissances impérialistes, quels que soient leurs régimes et leurs gouvernements (exemples: Chine contre Japon, Irak contre la coalition impérialiste que dirigent les USA).


des partis ultra-nationalistes


Pour autant il ne s'agit pas de s'aligner, voire de prendre en charge, ces régimes, ces gouvernements, leurs politiques. Ni le gouvernement MECIAR, ni sa politique ne sont prolétariens. A loisir, "Libération", déjà cité, peut écrire:


«Non moins préoccupant pour l'avenir est son choix [à MECIAR] de partenaires, en particulier le Parti national slovaque... Son leader, Jan SLOTA ne cache pas ses sympathies pour les ultra‑nationalistes russes ou roumains, et s'est empressé d'envoyer un télégramme de félicitations à HAIDER, leader de l'extrême‑droite autrichienne pour ses récents succès électoraux. Dans une récente interview il s'en prend aux banques occidentales, au lobby juif, à George SOROS et, bien sûr, "aux activités anti‑slovaques de la minorité hongroise". Ce parti doit obtenir le ministère de la Défense et de l’Éducation, ce qui promet des relations tendues avec la dite minorité (11% de la population).»

Le Parti national slovaque est un parti manifestement ultra‑nationaliste, profondément réactionnaire. L'affirmation de Jan LUPTAK: ‑ «Nous sommes pour l'application de la loi qui protège les droits de la minorité hongroise» ‑ ne change rien à la nature du PNS. Quant au parti de MECIAR, le "HZDS", c'est un parti petit‑bourgeois où se sont réfugiés nombre d'apparatchiks. Lui aussi est ultra‑nationaliste. Telles sont deux des composantes du gouvernement auquel le "ZRS" participe. La remise en cause de privatisations ne change pas la nature de ce gouvernement et de sa politique. Nombre de gouvernements petits‑bourgeois en conflit avec l'impérialisme ont procédé à d'importantes nationalisations, ce qui ne les a pas empêchés d'être des gouvernements anti‑ouvriers, réprimant le prolétariat, la population laborieuse, la jeunesse et finalement composant avec l'impérialisme.


il n'y a pas de voie slovaque


Loin d'ouvrir une voie quelconque au prolétariat, à la population laborieuse, à la jeunesse, le nationalisme leur ferme toute issue. Il n'y a pas de solution "slovaque" dans la lutte contre le capital, l'impérialisme. La seule issue est internationaliste, ouvrière et révolutionnaire. La seule perspective pour le prolétariat ce sont les États Unis Socialistes d'Europe centrale et balkanique inclus dans les États Unis Socialistes d'Europe.


Jan LUPTAK insiste sur la satisfaction des revendications énumérées ci‑dessus. Il menace: «Nous avons dit publiquement que si nos partenaires ne respectent pas cet accord nous le dirons aux travailleurs et nous quitterons la coalition». Il avait déjà dit que le ZRS ne participerait pas au gouvernement et il y participe. Mais surtout satisfaire les revendications de la classe ouvrière, de la population laborieuse, de la jeunesse n'est pas durable, ne saurait se prolonger sans aboutir à la faillite si cette satisfaction ne s'intègre pas à une politique d'ensemble permettant à l'économie de fonctionner, de se développer, dans le cadre de rapports politiques, sociaux, économiques nationaux et internationaux déterminés. Jan LUPTAK croit‑il répondre à ces problèmes lorsqu'il affirme:


«Le maintien de la production nationale
[...] signifie renouer les liens économiques avec les pays de l'ex‑URSS, liens qui avaient été artificiellement rompus par le précédent gouvernement, alors qu'ils sont pourtant nos marchés et débouchés naturels.»


C'est d'abord oublier un peu vite que les relations économiques et autres avec l'ex‑URSS et les pays que la bureaucratie du Kremlin assujettissait ont provoqué la faillite de l'économie là où le capital avait été exproprié et où elle était planifiée. C'est faire abstraction de qui détient aujourd'hui le pouvoir dans ces pays, les liens de leurs gouvernements avec les puissances impérialistes, la restauration capitaliste en cours. C'est croire, ou faire semblant de croire, que ce qui fut peut être reconstruit (en mieux naturellement).


Les vraies réponses sont évacuées. En Slovaquie, comme dans les autres pays, il faut un gouvernement ouvrier, que le prolétariat prenne le pouvoir, détruise le vieil appareil d'Etat, hérité du passé (police, armée, justice, administration, etc...) et constitue son propre appareil d'Etat. Alors l'économie pourra être planifiée, mais cette fois sous contrôle ouvrier, et en fonction des besoins des larges masses. Cette condition est encore loin d'être suffisante. L'économie slovaque n'est pas viable par elle‑même, même planifiée, même sous contrôle ouvrier et cela d'autant plus qu'elle est prise dans les tenailles du capitalisme mondial, hostile et la boycottant. Isolé à la Slovaquie, le pouvoir ouvrier n'est pas durable.


Il faut donc un programme, une politique qui fassent la jonction entre le prolétariat slovaque et les prolétariats des autres pays, plus directement de l'Europe centrale et des Balkans bien que pas seulement. C'est de la révolution prolétarienne dont il s'agit et pour laquelle il faut combattre politiquement, la révolution slovaque étant un élément de la révolution dans cette région du monde et en dépendant vraiment très étroitement. Il faut rompre avec le nationalisme. Au lieu de quoi le ZRS participe au gouvernement ultra‑nationaliste de MECIAR. Il désarme ainsi le prolétariat slovaque. Et, on ne découpe pas la politique d'un gouvernement en tranches, comme du saucisson: participant à ce gouvernement il le couvre ; il en est totalement responsable.


Sur tout cela l'organe du "PT", de "la démocratie", du CCI, "IO", les citoyens Gluckstein et Lambert sont muets comme des carpes. Gluckstein et Lambert, Lambert et Gluckstein ont d'autres tâches: ils organisent «dans l'indépendance» une «conférence ouvrière mondiale» pour éviter aux appareils bureaucratiques des centrales syndicales, des fédérations, des syndicats de tomber «dans le piège» du sommet social de l'ONU. Ils l'organisent sous l'égide du "ZRS" membre du gouvernement MECIAR, ce qui est une façon de cautionner sa politique.


louisa hanoune et le «pt d'algérie» dans leurs œuvres


Dans le même numéro d'«IO» où il y a «le reportage en Slovaquie» est publié un «communiqué du Parti des travailleurs d'Algérie» daté du 17 janvier 1995, que signe Louisa HANOUNE. Ce communiqué s'efforce de "justifier" le «contrat national» (car tel est le nom de ce texte) rédigé à Rome par le Front islamiste du salut, le Front de libération nationale, le Mouvement pour la démocratie en Algérie, le Mouvement pour la renaissance islamique et le Parti des travailleurs algériens dont Louisa HANOUNE a été la représentante et le porte‑parole. Elle y affirme:


«Dans cette réunion (celle de Rome) il n'était pas question de dégager un projet de société commun, mais uniquement (sic) de se mettre d'accord sur l'échange des points de vue sur les garanties et conditions permettant la concrétisation d'une solution politique au drame algérien.»


C'est énorme. Louisa HANOUNE poursuit:


«Un projet de société est du ressort du peuple qui par la confrontation des différents programmes, dégagera lui-même librement sa représentation politique et ses institutions en toute souveraineté. Pour cela, il a besoin d'être rétabli dans ses droits démocratiques et donc qu'il soit mis fin à la guerre qui déchire le pays.

«Une plate-forme commune a été dégagée pour cet objectif. Elle est le produit de discussions libres dans le respect des programmes politiques.»


En sorte se serait tenue à Rome une "réunion démocratique", élaborant un cadre "démocratique", pour un "régime démocratique", dans le respect des programmes réciproques des organisations et partis, des uns et des autres: au "peuple" de trancher. Décidément les voies d'Allah sont impénétrables. Comment le "PT d'Algérie", une "trotskyste" ou prétendue telle, une femme peut-elle cautionner ainsi un mouvement comme le FIS dont la loi suprême est la "charria", la soumission à l'Islam, et la relégation des femmes à la situation d'esclaves, propriétés privées des hommes.


Le "PT d'Algérie", Louisa HANOUNE ont fait un bloc politique avec les agents de la réaction religieuse noire (le FIS), avec ces autres tenants de l'Islam que sont le FLN, le MDA (Ben Bella), le MRI, avec le FFS (Hocine Aït Ahmed). Ensemble, ils ont déclaré (un des points sur lesquels la déclaration du "PT d'Algérie" fait silence):


«Les éléments constitutifs de la personnalité algérienne sont l'Islam, l'arabité et la berbérité.»


En guise de "lutte pour la laïcité", réaffirmation que l'Islam est la religion d'Etat. On trouve aussi dans ce «contrat national» l'engagement suivant:


«Les partis s'engagent à respecter la Constitution du 23 février 1989. Son amendement ne peut se faire que par les voies constitutionnelles.»


Après quoi Louisa HANOUNE peut toujours jacasser sur la "Constituante algérienne souveraine". Décidément elle vient de mener une brillante campagne. Pour se justifier elle avance:


«J'ai participé, car, pour le Parti des travailleurs le pays s'enfonce dangereusement dans la guerre et la décomposition. Un parti responsable attaché aux intérêts du peuple et de la nation
[sic] se doit de tout faire pour empêcher le pire, pour soulager les souffrances qui n'ont que trop duré.» La déclaration du "PT d'Algérie" porte en exergue «Tourner le dos à une possibilité de rétablissement de la paix équivaudrait à préparer la dislocation de la nation algérienne.»

Là aussi la «réal politique», la politique du «moindre mal» fait de sérieux dégâts. Bientôt ce sera «hommes de bonne volonté unissons-nous». Mais il est vrai que Louisa HANOUNE part de la "nation algérienne" et dissout les classes dans le vague concept de "peuple". L'affrontement meurtrier et terrible pour les masses actuel n'est pas né de rien. Le prolétariat algérien, la population laborieuse, la jeunesse ont ébranlé par leurs combats la dictature du FLN, mais sans être en mesure d'imposer leur pouvoir, leur solution politique. Dans ces conditions le FIS a pu se développer qui visait et vise, serait‑ce en utilisant le bulletin de vote à prendre le pouvoir et à instaurer le régime de la "charria". Les cadres de l'armée se sont saisis du pouvoir tombant des mains du FLN. Le 26 novembre 1991 ont eu lieu en Algérie des élections législatives. Les résultats ont été les suivants : 41 % des électeurs n’y ont pas participé ; le FIS a obtenu 188 des 430 sièges à pourvoir, il était assuré d’obtenir la majorité absolue au 2e tour, le 16 janvier ; le FNL 15 sièges ; le FFS 25 sièges.


Les militaires ont annulé les élections et instauré une dictature ouverte, dissout le FIS, etc... Les affrontements sanglants et meurtriers n’étaient pas loin. L'issue est-elle dans "l'œcuménisme démocratique"? C'est se moquer du monde que de le prétendre. La victoire du gouvernement actuel, c'est l'écrasement des masses. La victoire du FIS c'est l'écrasement des masses. Un compromis gouvernement actuel ‑ FIS, sous l'égide de l'impérialisme US, c'est encore l'écrasement des masses. «Le contrat national» est entièrement favorable au FIS. Pour lui, mouvement théocratique et donc par essence totalitaire, le «contrat national» est une excellente couverture "démocratique" que lui fournissent Hocine Aït Ahmed et son FFS, Ben Bella et son MDA... ainsi que Louisa HANOUNE et son "PT d'Algérie".


La seule issue pour le prolétariat et les masses exploitées d'Algérie c'est de s'organiser sur leurs propre plan en rompant avec les forces bourgeoises et petites‑bourgeoises - toutes plus ou moins agents de l'impérialisme ‑ l'Etat algérien ; c'est de combattre pour leurs objectifs de classe, dans la perspective d'un gouvernement ouvrier et paysan. Or Louisa HANOUNE et le "PT d'Algérie" pactisent avec leurs ennemis. Ils leur rendent plus difficile de s'engager sur cette voie.


alexandre hebert dans ses œuvres


On ne peut pas non plus passer sous silence l'interview que Alexandre HEBERT a accordé à «Ouest‑France».


 

"Après 42 ans à la tête de l'UD Force Ouvrière, Alexandre Hébert a décroché. Il n'en a pas pour autant abandonné toutes ses activités. Il n'a pas non plus renié les idées anarcho-syndicalistes de sa jeunesse. Pour lui, les congrès de Nantes sont loin de n'être qu'un tendre folklore.

 

Il y a cent ans c'était le beau temps perdu des divines utopies?

N'allez pas si vite! Bien sûr la notion de grève générale destinée à transformer radicalement la société est un mythe. Mais ce qui est fondamentalement en cause c'est son côté messianique. En revanche, si l'on parle de grève généralisée, alors là, oui, c'est toujours une arme puissante aux mains des travailleurs. Voyez 36, 53 ou même 68. Une telle grève reste d'actualité et, croyez-moi, un jour ou l'autre on va y être confronté. La classe ouvrière a été tellement assommée depuis 82…

 

Le congrès de Nantes, c'est aussi l'affirmation de l'indépendance syndicale…

Là c'est le grand enseignement de nos aînés. Pour moi, le débat est historiquement réglé, mais pas pour tous. Que disait Guesde, ce Torquemada a lorgnon? Que l'important, pour les ouvriers, c'était de prendre le pouvoir. Que rétorquaient les anarchistes? Qu'il ne faut pas espérer en la prise du pouvoir. Si on le prend normalement, on devient gérant loyal du capitalisme. Si on le prend totalement, c'est pire. Voir Staline.

 

Mais alors que faire?

Face au pouvoir, il faut savoir dresser une force qui peut peser sur l'Histoire. Rechercher le pouvoir à tout prix a toujours conduit à une dégénérescence. Une preuve supplémentaire nous est donnée aujourd'hui avec l'aventure d'une gauche mutilée qui s'achève, dirigée par un vichyssois

 

Les nantais d'il y a cent ans avaient donc vu clair?

Absolument. Cela ne veut pas dire que les syndicalistes doivent se désintéresser de la politique. Nous ne sommes pas candidats au pouvoir mais nous ne sommes pas apolitiques. Nous sommes indépendants certes mais nous avons notre mot à dire sur la construction d'une société plus juste ou plus injuste. Par exemple ce n'est pas parce que le stalinisme a tout sali que le capitalisme serait le fin du fin. Regardez ses effroyables dégâts.

 

Cent ans après, nostalgie ou espoir?

Espoir, bien sûr. Je crois profondément que la classe ouvrière va reconstruire ses organisations sur ces notions simples mais qui ne se discutent plus: l'indépendance et la lutte de classe

 

Recueilli par M.SCHEID "

 


Alexandre Hébert a été et est toujours une des pierres angulaires du PT français, de l'EIT, de l'AET. Il a été, s'il n'est encore, pendant près de vingt ans, membre du bureau politique du PCI devenu aujourd'hui CCI. Or il explique cyniquement:


«Il ne faut pas espérer en la prise du pouvoir. Si on le prend normalement
[normalement!!!] on devient gérant loyal du capitalisme. Si on le prend totalement c'est pire. Voir Staline.»


C'est net et précis: le prolétariat ne doit pas prendre le pouvoir. Quel que soit le verbiage qui suit, la conclusion est évidente: pérennité du pouvoir bourgeois, de la société bourgeoise, de l'exploitation capitaliste. Tout au plus faut‑il s'efforcer qu'ils soient moins durs aux travailleurs. L'«anarcho‑syndicaliste» a délivré son message.


Cette orientation est génératrice des pires compromissions. Plus grave encore: à un moment où la crise du régime capitaliste gagne en profondeur, où pour lui est vital d'écraser économiquement le prolétariat, où de plus en plus la question‑clé est celle de la lutte pour le pouvoir, elle désarme politiquement la classe ouvrière, la population laborieuse, la jeunesse et les conduit à la défaite.


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Voilà trois exemples de ceux avec lesquels et de l'orientation sur laquelle les citoyens Gluckstein et Lambert prétendent construire une "internationale". Quelle dégénérescence! En réalité ils dressent de nouveaux obstacles à la reconstruction du mouvement ouvrier sur un nouvel axe, à la construction de partis ouvriers révolutionnaires, de l'Internationale ouvrière révolutionnaire sur le programme de la révolution prolétarienne.


 

Le 27 janvier 1995.

 

 

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