Lutte de classe
Texte paru comme supplément à Combattre pour le socialisme n°55 en février 1995
Dans le même numéro d'«IO» où il y
a «le reportage en Slovaquie» est publié un «communiqué du Parti des
travailleurs d'Algérie» daté du 17 janvier 1995, que signe Louisa HANOUNE. Ce
communiqué s'efforce de "justifier" le «contrat national» (car tel
est le nom de ce texte) rédigé à Rome par le Front islamiste du salut, le Front
de libération nationale, le Mouvement pour la démocratie en Algérie, le
Mouvement pour la renaissance islamique et le Parti des travailleurs algériens
dont Louisa HANOUNE a été la représentante et le porte-parole. Elle y affirme:
«Dans cette réunion (celle
de Rome) il n'était pas question de dégager un projet de société commun,
mais uniquement (sic) de se mettre d'accord sur l'échange des points de
vue sur les garanties et conditions permettant la concrétisation d'une solution
politique au drame algérien.»
C'est énorme. Louisa HANOUNE
poursuit :
«Un projet de société est du
ressort du peuple qui par la confrontation des différents programmes, dégagera
lui-même librement sa représentation politique et ses institutions en toute
souveraineté. Pour cela, il a besoin d'être rétabli dans ses droits
démocratiques et donc qu'il soit mis fin à la guerre qui déchire le pays.
«Une plate-forme commune a été
dégagée pour cet objectif. Elle est le produit de discussions libres dans le
respect des programmes politiques.»
En sorte se serait tenue à Rome
une "réunion démocratique", élaborant un cadre
"démocratique", pour un "régime démocratique", dans le
respect des programmes réciproques des organisations et partis, des uns et des
autres: au "peuple" de trancher. Décidément les voies d'Allah sont
impénétrables. Comment le "PT d'Algérie", une "trotskyste"
ou prétendue telle, une femme peut-elle cautionner ainsi un mouvement comme le
FIS dont la loi suprême est la "charria", la soumission à l'Islam, et
la relégation des femmes à la situation d'esclaves, propriétés privées des
hommes.
Le "PT d'Algérie",
Louisa HANOUNE ont fait un bloc politique avec les agents de la réaction
religieuse noire (le FIS), avec ces autres tenants de l'Islam que sont le FLN,
le MDA (Ben Bella), le MRI, avec le FFS (Hocine Aït Ahmed). Ensemble, ils ont
déclaré (un des points sur lesquels la déclaration du "PT d'Algérie"
fait silence):
«Les éléments constitutifs de la
personnalité algérienne sont l'Islam, l'arabité et la berbérité.»
En guise de "lutte pour la
laïcité", réaffirmation que l'Islam est la religion d'Etat. On trouve
aussi dans ce «contrat national» l'engagement suivant:
«Les partis s'engagent à respecter
la Constitution du 23 février 1989. Son amendement ne peut se faire que par les
voies constitutionnelles.»
Après quoi Louisa HANOUNE peut
toujours jacasser sur la "Constituante algérienne souveraine".
Décidément elle vient de mener une brillante campagne. Pour se justifier elle
avance :
«J'ai participé, car, pour le
Parti des travailleurs le pays s'enfonce dangereusement dans la guerre et la
décomposition. Un parti responsable attaché aux intérêts du peuple et de la
nation [sic] se doit de tout faire pour empêcher le pire, pour soulager les
souffrances qui n'ont que trop duré.» La déclaration du "PT
d'Algérie" porte en exergue «Tourner le dos à une possibilité de
rétablissement de la paix équivaudrait à préparer la dislocation de la nation
algérienne.»
Là aussi la «réal politique», la
politique du «moindre mal» fait de sérieux dégâts. Bientôt ce sera «hommes de bonne
volonté unissons-nous». Mais il est vrai que Louisa HANOUNE part de la
"nation algérienne" et dissout les classes dans le vague concept de
"peuple". L'affrontement meurtrier et terrible pour les masses actuel
n'est pas né de rien. Le prolétariat algérien, la population laborieuse, la
jeunesse ont ébranlé par leurs combats la dictature du FLN, mais sans être en
mesure d'imposer leur pouvoir, leur solution politique. Dans ces conditions le
FIS a pu se développer qui visait et vise, serait-ce en utilisant le bulletin
de vote à prendre le pouvoir et à instaurer le régime de la
"charria". Les cadres de l'armée se sont saisis du pouvoir tombant
des mains du FLN. Le 26 novembre 1991 ont eu lieu en Algérie des élections
législatives. Les résultats ont été les suivants : 41 % des électeurs n’y ont
pas participé ; le FIS a obtenu 188 des 430 sièges à pourvoir, il était assuré
d’obtenir la majorité absolue au 2e tour, le 16 janvier ; le FNL 15 sièges ; le
FFS 25 sièges.
Les militaires ont annulé les élections et instauré une dictature ouverte, dissout le FIS, etc... Les affrontements sanglants et meurtriers n’étaient pas loin. L'issue est-elle dans "l'œcuménisme démocratique"? C'est se moquer du monde que de le prétendre. La victoire du gouvernement actuel, c'est l'écrasement des masses. La victoire du FIS c'est l'écrasement des masses. Un compromis gouvernement actuel - FIS, sous l'égide de l'impérialisme US, c'est encore l'écrasement des masses. «Le contrat national» est entièrement favorable au FIS. Pour lui, mouvement théocratique et donc par essence totalitaire, le «contrat national» est une excellente couverture "démocratique" que lui fournissent Hocine Aït Ahmed et son FFS, Ben Bella et son MDA... ainsi que Louisa HANOUNE et son "PT d'Algérie".
La seule issue pour le prolétariat et les masses exploitées d'Algérie c'est de s'organiser sur leurs propre plan en rompant avec les forces bourgeoises et petites-bourgeoises - toutes plus ou moins agents de l'impérialisme - l'Etat algérien ; c'est de combattre pour leurs objectifs de classe, dans la perspective d'un gouvernement ouvrier et paysan. Or Louisa HANOUNE et le "PT d'Algérie" pactisent avec leurs ennemis. Ils leur rendent plus difficile de s'engager sur cette voie.