Lutte de classe
Construction
du parti (3)
L'initiative que nous avons lancée
depuis un mois n'a pas abouti. Pas la moindre discussion n'a pu être engagée
avec les différents groupes issus du PCI-PT (CRI, CCI-T, CPS-Comité, La
Commune, Groupe bolchevik). Pour être totalement honnête avec les militants,
nous nous y attendions, nous ne nous faisions aucune illusion, mais comme nous
n'avons aucun a priori non plus, nous avons voulu voir ce que les uns et les
autres avaient vraiment dans le ventre, comme l'on dit. Le résultat est
éloquent.
Cependant
nous ne renoncerons pas, parce que ce n'est pas notre habitude de céder à l'air
du temps. Nous avons un objectif et rien ni personne ne pourra nous en
détourner.
Pour alimenter la réflexion des
militants qui se connectent régulièrement sur le site, à défaut de discussion,
ce qui semble en effrayer plus d'un apparemment, nous nous servirons d'extraits
de courriels que nous avons reçus tout en conservant l'anonymat des uns et des
autres, afin de montrer dans un premier temps quels arguments ont été avancés
pour refuser cette discussion, implicitement ou explicitement.
Ensuite, au fil des semaines, nous
essayerons d'y voir un peu plus clair dans les positions des uns et des autres,
à partir des documents qui figurent sur leurs sites Internet. En gros, nous
nous livrerons au même travail d'analyse critique que nous menons depuis plus
d'un an sur le Parti des travailleurs.
Entre
temps, j’argumenterai mes propres positions sur tous les sujets proposés à la
discussion.
Nous
allons aborder les extraits de ces courriels après les avoir regroupés par
thèmes, pour autant que cela fut possible.
A
en croire certains, les différents groupes de militants issus du PT ne
vaudraient pas mieux que la maison mère. De manière générale, ils ont une
piètre opinion les uns des autres, c’est un euphémisme. "Si l'héritage
du PCI a du bon", il a aussi son pendant négatif, les militants y
auraient été "formés et déformés", ils considèreraient "la
moindre divergence comme l'expression d'une déviation liquidatrice
intolérable". Autant dire que leur conception du parti est plus proche
de celle du PT que de celle de Lénine.
Il
est évident qu'il est toujours difficile, voir parfois impossible, de prendre
du recul sur sa propre expérience, il en va ainsi dans la vie en général.
J'aurais tendance à dire que plus nous sommes restées longtemps au PT et plus
la déformation est profonde et s'avérera difficile à réduire complètement, je
n'y suis resté que trois ans.
L'inconscience
et l'ignorance ambiantes atteignent un tel degré, qu'il y en a qui vont jusqu'à
se venter d'être restés des décennies à l'OCI-PCI-PT, comme si cela leur
conférait par avance une sorte d'autorité ou de légitimité particulière.
Pendant que d'autres se réclament d'ex-dirigeants exclus de l'OCI-PCI ayant
fait partie de son appareil pendant de longues années. A leur place, j'aurais
évité de m'en venter, mais c’est révélateur de leur état d’esprit général. A
défaut de se livrer à un examen critique de l'ensemble de leur activité passée
au sein de ce parti, ils se retranchent volontiers derrière ce genre
d'arguments qui tendraient plutôt à prouver qu'ils n'ont jamais été capables de
mener cette analyse jusqu'au bout, dans le cas contraire, ils auraient adopté
une toute autre attitude. D’ailleurs, Il est curieux qu’ils n’aient pas quitté
l’OCI-PCI-PT 5, 10 ou 20 ans plus tôt, non ? Cette question ne leur vient
même pas à l’esprit, semble-t-il.
"La
dispersion de ces différents groupes (serait)comme autant de
chapelles sacrées."
Heureusement,
nous n'aurons pas à prier pour elles pour l'éternité : "Mais le cours
de l'histoire imposera aux uns et aux autres d'en finir avec le sectarisme,
sauf à disparaître."
C'est
évidemment ce que chacun répète invariablement en parlant des autres. Cela ne veut
absolument rien dire et n'engage à rien. Jusqu'à preuve du contraire, le
sectarisme semble être une valeur savamment partagée ou distillée, et ceux qui
feignent de l'avoir abandonné, ont délibérément sombré dans l'opportunisme, par
exemple en s'encanaillant avec des dignitaires du PS et des Verts, de
véritables démocrates, bourgeois assurément, ou en s’avérant incapable de
sortir un tract commun lors de la bataille contre le CPE, par exemple.
"la
multiplication des petits groupes en tout sens, ce qui peut toujours se
justifier avec un peu de coupage de cheveux en quatre, bien entendu."
On
peut tout justifier après coup, comme on peut tout accepter un jour ou l'autre.
A ce petit jeu là, on sombre rapidement dans l'aventurisme ou l'opportunisme,
consciemment ou non, peu importe, on s'en fout, seuls les actes comptent, les
intentions sont du domaine de l'extrapolation ou de la spéculation gratuite et
ne nous intéressent absolument pas ici. Cela me fait penser inévitablement à ce
qu'on entend dire partout : chacun sa vérité, ce qui revient à dire en réalité,
que la vérité n'existerait pas. C'est sans doute commode... pour faire du
sur-place ou pour reculer à la moindre pression ! C'est incroyable comment on
peut perdre son temps à s'occuper de choses ne présentant pas le moindre
intérêt et ne pas s'en rendre compte.
Puisque
personne ne sait pour quelle raison politique ni dans quelles conditions
exactes ces militants ont été exclus ou ont démissionnés du PT, donc sans
vouloir donner raison ou tort à la direction du PCI-PT, car même si je le
voulais, je ne le pourrais pas, au regard des positions politiques développées
par les uns et les autres, il faut bien reconnaître qu'elles présentent des
divergences politiques fondamentales entre elles et avec celles du PT. Ramener
ces divergences de fond qui devraient être discutées, à un exercice qui
consisterait à couper un cheveu en quatre, c'est se livrer à une discussion
sans fin de boutiquiers !
Ne
faudrait-il pas dire plutôt que chaque groupe a besoin d'afficher sa différence
avec le PT, et donc de se distinguer des autres groupes, pour exister tout
simplement ? De ce côté là, l'imagination ne manque pas assurément. Il est vrai
qu'on peut couper un cheveu en quatre en attribuant des longueurs différentes à
chaque morceau, et cela à l'infini. A défaut d'avancer dans la construction du
parti, on s'occupe comme on peut, on fait illusion.
Un
exemple suffira pour étayer ici mon propos. Le PT met en avant le mot d'ordre
de défense de la République une et indivisible, ou alors celui de défense de la
nation, contre la régionalisation, en expliquant que les droits sociaux des
travailleurs ont été acquis dans ce cadre là, pour faire bref. A première vue,
ces mots d'ordre peuvent paraître surprenants à plus d'un, mais quand on les
replace dans les conditions politiques du début des années 2000, ils s'opposent
à la tentative de destruction des services publics, du Code du travail, des
conventions collectives, de l'ensemble des droits sociaux qui ont été conquis
au cours du XXe siècle par les générations de combattants qui nous ont
précédées, etc.
Le
problème est ailleurs, il est dans la perspective dans laquelle on les situe. A
toujours chercher la paille qu'il y a dans l’œil du voisin, on finit par
devenir aveugle ! Pour le PT, il s'agit de la démocratie en générale, ce qui
peut être interprété comme une tentative de restaurer la forme de démocratie
qui existait lorsque le capitalisme était dans sa phase ascendante. Comme cette
époque est définitivement révolue, ce mot d'ordre se charge donc d'un contenu
réactionnaire, parce qu'il est orienté vers la préservation du système
capitaliste. Maintenant, si le même mot d'ordre est orienté vers la prise du
pouvoir par les travailleurs pour imposer la démocratie ouvrière, au moyen de la
révolution prolétarienne ou sociale, peu importe, il s'agit de tout autre
chose. On ne peut que souscrire à cette orientation, puisqu'il faut aussi
défendre tous les acquis, y compris ceux que la bourgeoisie avait conquis et
qu'elle renie aujourd'hui ou qu'elle n'a plus les moyens d'assumer du fait de
l'approfondissement de la crise du capitalisme, ce que j'appelle la phase
finale du capitalisme.
A
mon avis, le vrai sectarisme, il est principalement là et pas ailleurs. Ces
groupes cherchent à s’éloigner à tout prix des positions du PT sans se donner
la peine de les analyser sur le fond.
Il
y a deux camarades qui m'ont écrit textuellement qu'il ne fallait pas jeter le
bébé avec l'eau du bain en parlant du PT. Je ne l'ai jamais ni dit ni fait non
plus. J'ai toujours pensé qu'il fallait essayer de tirer le meilleur parti de
chaque situation, chose ou individu, lorsque c'était possible, sans a priori,
mais en respectant toujours un certain nombre de principes.
Internet
serait à l'origine de "l'établissement de micro groupes parfois
virtuels, fondés par des poignées d'individus - bref à la généralisation des
mœurs individualistes et petites bourgeoises dans le mouvement ouvrier (chacun
pour soi).". C'est possible, je n'en sais rien. Que les idées
dominantes de la classe dominante étendent à des degrés divers leur domination
ou leur emprise sur les partis ouvriers, c'est l'évidence même, sinon nous n'en
serions pas là aujourd'hui. Tout ce que je sais, c'est que tous les groupes qui
existent aujourd'hui ne regroupent que "des poignées" de
militants, jusqu'à preuve du contraire, puisque l'opacité en la matière est de
règle : combien y a-t-il exactement de militants dans chaque groupe ? Eux seuls
le savent, c’est un secret !
En
ce qui me concerne, les militants qui se connectent sur le site Lutte de
classe depuis près de deux ans, ont même eu droit aux photos de ma maison
dévastée par le tsunami le 26 décembre 2004. Ils savent très bien que je vis à
10 000 kilomètres de Paris depuis 10 ans, je ne leur ai jamais rien caché.
J'anime seul ce site, ce qui ne veut pas dire évidemment que je n'ai pas des
contactes épisodiques ou réguliers avec des militants. S'il n'y a pas de
compteur sur le site pour comptabiliser les visites, si je n'ai pas non plus de
programme pour récupérer les adresses des militants qui se connectent, c'est
parce que je ne fais pas de prosélytisme, je ne veux pas harceler les
militants. Je ne cherche pas non plus à les convaincre de quoi que ce soit, ce
n'est pas ma méthode. Je préfère que chacun réfléchisse librement aux arguments
que j'avance et aux analyses que je propose, sans à aucun moment vouloir les
influencer dans un sens ou dans un autre. J'ai confiance dans la capacité des
militants à faire eux-mêmes la part des choses à un moment donné, comme j'ai
confiance dans la capacité de la classe ouvrière à prendre le pouvoir, cela va
de paire. Pour moi, la pire des choses serait qu'un militant répète bêtement ce
qu'il a lu dans mon site sans l'avoir compris auparavant par lui-même, il se
ferait vertement engueuler!
"le
spectacle de décomposition qu'offrent les petits groupes issus du naufrage de
l'OCI ne peut bien entendu que soulever le cœur. " On peut
sans doute parler de décomposition lorsqu'on se rend compte que ces militants
s'écartent de plus en plus du fond commun qui les réunissait lorsqu'ils étaient
au PCI-PT, c'est-à-dire le programme de la révolution prolétarienne, peu
importe ici que les dirigeants du PCI-PT l'aient abandonné au début des années
80. Ce qui pour eux était inacceptable hier, est devenu bizarrement acceptable
aujourd'hui, sans qu'ils soient capables de nous expliquer en quoi au juste ni
ce qui justifie ce revirement. Partant de cette constatation, on peut parler
effectivement de décomposition. Qu'elle nous rende malade, c'est un euphémisme.
Ce
qui caractérise le plus le PT, il faut le rappeler, c'est un ensemble de
méthodes auquel sa direction a recours pour asseoir son pouvoir sur les
militants depuis plus de 40 ans : le verticalisme (prenez le cas de l'exclusion
des 26 militants de la fédération de l'Yonne, dans la fédération voisine, aucun
militant n'était au courant, par exemple, les ordres descendent d'en haut et
tout est cloisonné en strates parfaitement étanches.), l'opacité (sur son
passé, sur sa trésorerie, sur ses dirigeants, etc.), l'ensemble des méthodes
utilisées par les partis staliniens, calomnies (voir les affaires Just,
Bonnetain, Tardieu, Petitdent, etc.), manipulations (citations, faits
camouflés, tronquées, fabriqués, tendances créées de toute pièce, tout y passe),
falsification et réécriture de l'histoire (il n'y a jamais eu d'accords signés
entre les appareils et les gouvernements de l'époque en 36 et 68, par exemple),
machinations (voir les affaires Just, Bonnetain, Tardieu, Petitdent, etc.),
intimidations verbales et physiques (je dispose de preuves accablantes de
différentes époques et provenant de militants qui ne pouvaient pas se
connaître), sectarisme et mépris des militants du mouvement ouvrier en général
(et de leurs propres militants), paranoïa à la limite du dérèglement mental ou
de l'aliénation complète (leur local est un bunker repoussant et inhospitalier,
sans parler des blases et de l'organisation paramilitaire des membres du CCI
qui rappellent la période d'illégalité de la seconde guerre mondiale, la
crainte permanente d'être infiltré, etc.), mégalomanie galopante et culte de la
personnalité (ils seraient les seuls dépositaires du marxisme et donc les
détenteurs exclusifs de la vérité), fétichisme envers les auteurs marxistes,
etc.
Commentant
la surenchère des mots d'ordre et des prétentions des uns et des autres : "Les
groupes posant à l'internationale à quelques dizaines, sont fondamentalement
incapables de jouer un rôle positif, tout comme ceux qui se seraient créés en
considérant que "l'offre politique", en quelque sorte, n'était pas en
adéquation à leur demande. C'est une illustration des mœurs aujourd'hui
dominées sans partage par les valeurs de l'hyper consommation, du règne de la
marchandise, qui tendent et poussent à l'atomisation de tout ce qui constitue
le mouvement ouvrier. Chacun son "offre personnalisée", chacun son
groupe "à la carte", sinon à crédit. Et le bruit ambiant, l'arrogance
de la stupidité sociale, permettront de noyer les absurdités, les âneries, les
canailleries des uns des autres." C'est l'auberge espagnole ! Cela
fait désordre et n'inspire pas vraiment confiance, c'est le moins que l'on
puisse dire. Face à cette cacophonie du plus mauvais genre, on a envie de tout
balancer sans se donner la peine d'aller voir ce qu'elle recouvre. C'est la
réaction de bon nombre de militants du PT ou d'ex-militants du PCI ou du PT qui
cherchent à s'organiser ailleurs qu'au PT, mais qui n'ont trouvé aucune
structure vraiment sérieuse pour les accueillir.
"Si
le mouvement ouvrier mondial était orienté par un puissant courant bolchevik,
communiste, révolutionnaire, l'émiettement des courants issu de l'OCI/PCI/CCI
serait vraiment mineur." Avec des si..., en d'autres
termes, on aurait déjà pris le pouvoir, voilà à quel truisme on aboutit,
navrant ! Au lieu de "mineur", je dirai plutôt
"insignifiant" pour remettre les choses à leur place et respecter les
proportions. Il y en a qui m'ont écrit qu'ils avaient distribué quelques
dizaines de milliers de tracts au cours des manifestations contre le CPE entre
fin janvier et mi-avril, pour se donner une certaine importance. Ramené aux 7,
8 ou 9 millions de manifestants au cours de cette période de trois mois, je
crois qu'il y a matière à rester modeste, non ? Ce qui n'enlève rien aux
mérites de ces militants évidemment, qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai
pas dit, mais encore une fois, je suis bien obligé de dire ici que c'est
malheureusement une fâcheuse tendance.
"dégager
une orientation qui permette le regroupement de révolutionnaires, c'est-à-dire
pas de "simples braillards qui se sont fait passer pour tels à force de
déclamer les mêmes slogans stéréotypés contre le gouvernement du jour",
comme l'écrivait Marx dans la guerre civile en France. Il faut donc, car ça n'a
rien de facile, être de la plus grande rigueur, de la plus grande honnêteté
intellectuelle, il faut voir loin." Voir loin, c'est être capable
d'élaborer une tactique-plan, comme disait Lénine dans Que faire ?,
menant de la situation actuelle à la prise du pouvoir... Or, il est très facile
à chacun de le vérifier : aucun groupe n'a développé à ce jour la moindre
tactique contrairement au PT, désolé de le dire, mais c'est la vérité. Les
formules gouvernementales avancées par les uns et les autres ne reposent
absolument sur rien. Une manif, un mot d'ordre, et voilà, on en a fini avec le
capitalisme, les institutions et le vieux monde ! Il n'y a rien de sérieux dans
tout cela, il faut bien l'avouer. On frôle le gauchisme.
Il
règne un état d'esprit entre ces groupes qui nous déplaît fortement. Au lieu
d'essayer de travailler ensemble, ils sont sans cesse en concurrence les uns
avec les autres. Pire, certains préfèrent encore avoir des relations avec des
salopards de réformistes bourgeois ou des staliniens plutôt que d'essayer de se
rapprocher de leurs camarades issus du PCI-PT. "il n'y aura pas de
cartel des ex de l'OCI. Oui au regroupement, mais il y a des frontières nettes
à établir, sinon tout regroupement sans principes, sans appréciation claire de
la période, serait voué à être balayé, disloqué, gangrené de l'intérieur."
La gangrène fait son chemin, nous en avons là une démonstration. Il faudrait
faire table rase du passé et repartir sur des bases saines pour pouvoir
véritablement espérer construire quelque chose de sérieux et de cohérent.
A
ce stade, il y a autre chose qui a retenu mon attention. Aucun groupe n'a
semble-t-il tourné définitivement la page du PCI-PT, j'en veux pour preuve les
critiques à l'emporte-pièce qui sont régulièrement adressées au PT. A vouloir
accuser à tout prix le PT de tous les maux, ils finissent chaque fois par se
déconsidérer eux-mêmes, cela tourne même parfois à l'infantilisme et au
ridicule. Ils manquent totalement de crédibilité. On ne convint personne de
cette manière là. On va m'accuser de jouer le rôle de redresseur de torts, je
m'en tape complètement, je dis simplement ce que je pense...
"Mais
aucune illusion ne doit être répandue sur le regroupement des groupes issus de
l'OCI-PCI : c'est une voie sans issue, on ne fabriquera pas un nouveau véhicule
en empilant ceux qui ont fini à la ferraille. Il faut suivre en cette matière
aussi la voie de Lénine." Entièrement d'accord, aucun
groupe existant actuellement ne sera capable dans l'avenir de constituer la
base du parti révolutionnaire en France. Soyons optimiste quand même, c'est
même indispensable. Partant du principe que rien ne se crée rien ne se perd
tout se transforme, on peut imaginer qu'un jour, un certain nombre de militants
se réussiront par tout mettre sur la table et parviendront enfin à poser les
bases de la construction d'un véritable parti révolutionnaire. Nous n'en
doutons pas un seul instant. Ce qui nous manque surtout, c'est un dirigeant de
la trempe de Lénine, aucun dirigeant n'a malheureusement son charisme et ses
capacités intellectuelles, nous sommes tous orphelins.
Contrairement
à beaucoup, je ne me prends pas pour ce que je ne suis pas ou ce que je ne
serai jamais, j'ai trop conscience de mes lacunes et de mes faiblesses pour ne
pas rester à ma modeste place. L'objet de ma démarche se limitait à essayer de
dégrossir le terrain, à tenter d'éliminer les parasites, les éléments
extérieurs à la lutte des classes qui polluent la discussion et la réflexion
pour avancer. A de multiples reprises dans la vie, j'ai dû repartir à zéro de
grès ou de force: les 47 fois ou j'ai changé de boulot, les 21 ou 22 fois où
j'ai déménagé, les deux fois où j'ai quitté la France avec quelques bagages
seulement et une somme modique en poche (250 000 francs), mes deux mariages, le
tsunami... Mais si je n'avais pas les pieds sur terre, si je n'avais pas chaque
fois pris le recul nécessaire sur le coup en continuant ensuite d'y réfléchir
même 30 ans plus tard, mais je serais déjà mort depuis longtemps ou je serais
réduit à l'état de loque humaine. Il n'y a pas que la lutte des classes qui
vous forge, encore faut-il faire la part des choses. Parce que tout part de la
politique et que tout y revient immanquablement, on a tendance à penser qu'il
n'existe que la politique, sauf que chacun d'entre nous à son caractère, sa
personnalité, sa propre psychologie, sa propre manière d'aborder les choses, il
serait hérétique d'en parler ou d'y faire référence, alors que bien des
blocages à la discussion politique pourraient être levés si nous tenions compte
aussi de ses critères. Je pense qu'une forme de sectarisme existe là aussi.
Par
crainte de commettre des erreurs, d’étaler ses faiblesses, de confondre
tolérance et laxisme, on préfère se refermer sur soi et refuser la discussion.
Personnellement, je prends un réel plaisir à reconnaître et corriger mes
erreurs publiquement et à me traiter de con, je vous assure que c’est
salutaire.
Les
uns et les autres n'ont, semble-t-il, pas compris le modeste rôle que je
pensais pouvoir jouer dans cette histoire. Certains sont même allés jusqu’à penser naïvement qu’ils pourraient se
servir de mon site pour diffuser leurs documents. Je n'avais nullement
l'intention de me poser en donneur de leçons, ce qui ne m'interdit pas de
polémiquer évidemment. Je pensais simplement jouer un rôle de médiateur, non
pas pour réunir des points de vue inconciliables, cela n'aurait eu aucun sens,
encore moins pour en imposer un, d'ailleurs je ne vois pas comment j'aurais pu
faire en étant à Pondichéry, mais pour que chacun essaie de se libérer petit à
petit du carcan dans lequel il est habitué à penser malgré lui. Je pensais
qu'un militant extérieur à ces groupes pouvait favoriser ce processus. Je n'ai
jamais voulu dénoncer tel ou tel groupe en particulier au profit d'un autre. Je
n'ai pas non plus imaginé une fusion des différents groupes, cela serait
stupide et suicidaire, car cela voudrait dire qu'on intègrerait dans la
nouvelle structure aussi bien ce qu'il y a à prendre dans chaque groupe que ce
qui est à jeter ou à abandonner.
La
modestie et l'humilité ne sont pas le fort de l'homme en général.
L'amour-propre excessif, l'orgueil démesuré, la vanité aveugle et la
mégalomanie sans borne pour certains, les intérêts individuels et mesquins
l'emportent finalement sur les intérêts collectifs du prolétariat, voilà le
constat que nous pouvons faire aujourd'hui. La différence essentielle entre ces
groupes et les dirigeants du PT, c'est que ces derniers ont délibérément,
consciemment, abandonné le combat pour le socialisme le jour où ils ont perdu
confiance dans la capacité du prolétariat à combattre jusqu'à la victoire
finale. Les dirigeants du PT ont décidé de liquider le PCI qui pouvait être
considéré à juste titre comme la base d'un véritable parti révolutionnaire,
pour se ranger définitivement du côté de la bourgeoisie, ce que la plupart des
militants du PT ignorent totalement. Alors que les différents groupes n'ont pas
capitulé consciemment, à proprement parlé, devant la bourgeoisie, tout au plus,
ils ne savent plus très bien où ils en sont, ce qui n'est pas du tout la même
chose, il ne faut surtout pas confondre.
Je
vous passe les déclarations creuses, vides et sans substances des uns et des
autres, voici néanmoins ce qu'on pourrait appeler un bêtisier trotskyste : il
faudrait vérifier "leur surface respective", qu'est-ce que
cela peut nous foutre alors ! ; "Perdre son temps en polémiques est
inutile", mais comme on ne peut déjà pas discuter, si on ne peut plus
polémiquer, on n'a plus qu'à fermer notre gueule ou se pendre ! ; la référence
à la Charte d'Amiens serait "rajouter de la confusion" ou
encore "aucun militant expérimenté se réclamant du marxisme ne peut
prétendre que partir d'idiosyncrasies nationales telles la Charte d'Amiens soit
un remède.", partir de rien du tout vaut bien mieux, c'est le plus
court chemin pour arriver nulle part ! J'imagine que ces
"internationalistes" tiennent le même raisonnement avec le Manifeste
du parti communiste et le Programme de transition qui doivent être
des idiosyncrasies internationales ! ; "Nous avons pourtant à
l'évidence une surface militante publique bien plus importante (doux
euphémisme) que la plupart de ceux que tu cites", là encore, quelle
arrogance ! Quelle supériorité ! on s'en fout de votre surface. Vous savez à
quoi elle me fait penser votre surface, à tout ce qui est superficiel, au
verni, c'est la chemise blanche que l'on passe sur la chemise sale ! C’est
également un terme utilisé par les créanciers et à ce que je sache on ne vous
doit rien ! ; "sans tabou aucun", tu parles ! ; On "a
abandonné, en même temps que la CCI-PT, la langue de bois.", si vous
ne nous l'aviez pas dit, on ne s'en serait jamais rendu compte, à défaut
d'idiosyncrasies, on serait tous voués à mourir idiot !, etc. Il paraît que la
patience est la première qualité d'un révolutionnaire, il en faut assurément,
j'avoue en manquer parfois, hélas !
Un
camarade un peu plus pondéré et ayant semble-t-il un peu plus les pieds sur
terre m'a écrit "Ton site peut pourtant avoir une utilité si tu
continues de te faire l'écho de textes qui ont de la valeur pour tous les
militants, et aussi s'il contribue à la critique indispensable du PT et du CCI.
mais tu ne peux évidemment pas en espérer plus !". Je compte bien
aller au-delà, c'est-à-dire continuer de produire mes propres analyses, si vous
n'y voyez pas d'inconvénients, merci.
En
conclusion pour aujourd'hui, je rappelle que je ne partage ni les méthodes ni
les perspectives politiques proposées par les différents groupes issus du
PCI-PT, ils pèchent tous par leurs lacunes et leurs parti pris. J'ai par ailleurs
exposé dans plusieurs textes qui figurent dans le site, mes propres positions
et la tactique-plan qui pourrait nous mener à la prise du pouvoir, je m’en
tiendrai donc à cela.
Je
pourrais vous donner des extraits de courriels que j'ai reçus de nombreux
militants et cadres du PT qui se sentent mal à l'aise dans leur parti, mais qui
ne le quittent pas parce qu'ils n'ont trouvé à ce jour aucun groupe qui leur
convient pour continuer le combat. Ils condamnent sans appel les méthodes
staliniennes des dirigeants du PT, ils vont jusqu'à détester leurs dirigeants
dans des termes d'une violence que je n'ai jamais utilisés moi-même, je n'ose
même pas les reproduire ici, c'est pour dire, mais ils ne peuvent pas encore
franchir le pas ou se regrouper au sein du PT. C'est évidemment à eux que je
m'adresse le plus souvent.
Le
PT est un parti de 6 300 militants environ. Il est parfaitement clair que ce
parti ne pourra pas continuer à exister longtemps dans sa forme actuelle avec
toutes les tensions et les contradictions qui l'habitent, compte tenu à court
terme de la radicalisation de la situation politique. A un moment donné, soit
il éclatera, soit les militants congédieront sa direction, ce qui nous semble
improbable, voir impossible. Quant à supporter une véritable tendance
indépendante de sa direction, dans le passé et jusqu'à aujourd'hui, les
dirigeants du PT ont toujours procédé à l'exclusion de tous ceux qui s'étaient
aventurés sur ce terrain là. Si ce schéma se produisait, il pourrait alors
peut-être à terme constituer la base du parti, je n'en sais rien, je réfléchis
à voix haute, comme cela m'arrive souvent. Cette tendance en relation
permanente avec des responsables politiques d'autres groupes ou formations
pourraient donner naissance à une organisation révolutionnaire, faudrait-il
encore que cette tendance au sein du PT regroupe plusieurs centaines ou
milliers de militants.
Une
autre solution (provisoire) pour les militants qui ne veulent pas rester
inorganisés pourrait consister à rejoindre les comités qui se sont constitués à
l’initiative du PT, sur la base d’une orientation politique axée sur la
nécessité d’en finir avec les institutions de la Ve République et le
capitalisme, au lieu de la « reconquête de la démocratie »
bourgeoise, compte tenu que la plupart des militants de ces comités ne sont pas
forcément alignés sur la direction du PT, en tirant à boulets rouges sur le
gouvernement et le régime au lieu de l’Union Européenne, en s’adressant à
toutes les couches du prolétariat, au lieu de s’adresser uniquement aux
syndicalistes de la fonction publique et aux élus.
L’exercice
peut s’avérer périlleux, certes, mais il mérite qu’on y réfléchisse, il ne
s’agit évidemment pas de « rouler » pour le PT, chacun l’aura
bien compris. L’essentiel est de procurer aux militants un moyen de continuer
le combat sans qu’ils se sentent obligés de s’engager ou de soutenir un parti,
une organisation ou un groupe. On ne fait pas toujours ce que l’on veut.
Je
ne peux sérieusement pas conseiller aux militants de rejoindre des comités
constitués à l’initiatives des staliniens, des réformistes ou des
crypto-staliniens de la LCR, etc., qui tous en cœur ont appelé à voter Chirac
en 2002, et dont l’objectif clairement affiché est le maintien du régime
capitaliste et la soumission complète à l’Union européenne.
J’ai
utilisé volontairement dans ce texte la forme d’une discussion à bâtons rompus
pour qu’il ne choque pas trop violemment les esprits les plus susceptibles. Je
n’ai voulu accabler personne en particulier, je me suis seulement borné à dire
ce que je pensais, sans compromis.
Tardieu
Jean-Claude
Le
16 mai 2006